Les parents : des partenaires incontournables

05/11/2015 16:00:58

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Toute personne dont le rôle professionnel est d’encourager les apprentissages chez l’enfant sait à quel point pouvoir faire équipe avec les parents est gagnant. Ceux-ci peuvent en effet contribuer de façon importante au développement de leur enfant, notamment en réinvestissant les conseils donnés. Ceci est particulièrement vrai en ce qui a trait au développement du langage oral. Mais quels sont, au juste, les aspects liés à la stimulation langagière offerte par les parents qui comptent vraiment? Plus encore, est-ce qu’enseigner des habiletés de stimulation du langage aux parents est réellement efficace? Une méta-analyse réalisée en 2011 par Roberts et Kaiser[1] fait le point sur la question.

Qu’est-ce qui fonctionne?

Dans leur recension des écrits, les auteurs relèvent quatre aspects qui sont associés à une stimulation parentale efficace, donc à un meilleur développement langagier chez les enfants, et ce, autant chez ceux qui présentent un développement normal que chez ceux qui ont un trouble du langage :

  • La quantité d’interactions parent-enfant. Une étude a démontré que des enfants de 12 à 18 mois au développement normal qui passaient plus de temps en interaction avec leur mère avaient un plus grand vocabulaire que ceux passant moins de temps en interaction avec elle (Tomasello, 1983, dans Roberts et Kaiser, 2011). Ainsi, les parents favoriseraient le développement langagier de leur enfant simplement en passant du temps en relation avec lui.
  • La réceptivité (responsiveness en anglais), c’est-à-dire les réponses verbales et non verbales des parents aux tentatives de communication de l’enfant et leurs réactions aux actions posées par l’enfant dans le jeu. Une étude a notamment démontré que la réceptivité de mères aux vocalisations de leur enfant de 13 mois pouvait prédire le moment d’apparition de plusieurs habiletés expressives importantes, comme l’acquisition des 50 premiers mots (Tamis-LeMonda et al., 2001, dans Roberts et Kaiser, 2011). En résumé, être à l’écoute de son enfant et réagir à ce qu’il fait en jouant serait une attitude gagnante pour les parents.
  • L’input langagier fourni à l’enfant. De nombreuses études ont porté sur le sujet, notamment en vue d’élucider le lien entre le vocabulaire des parents et celui de l’enfant. Les études citées par Robert et Kaiser (2011) témoignent de l’impact certes de la quantité de mots utilisés, mais aussi de la qualité (ou diversité) du vocabulaire employé. Ainsi, les parents gagneraient non seulement à parler beaucoup à leur enfant, mais à utiliser des mots variés.
  • L’utilisation de stratégies simples pour accompagner l’enfant, comme répéter ce qu’il a dit en ajoutant un élément et reformuler lorsqu’il a commis une erreur. À ce propos, une étude a établi que la fréquence d’utilisation de stratégies simples par les parents peut prédire les habiletés langagières de leur enfant de 3 ans (Smith et al., 2000, dans Roberts et Kaiser, 2011). Les parents pourraient donc stimuler le langage de leur enfant en utilisant des stratégies faciles à appliquer, d’ailleurs souvent employées spontanément.

Par ailleurs, les auteurs mettent en évidence un fait important : l’interaction parent-enfant est bidirectionnelle, donc la stimulation des parents peut influencer les habiletés de l’enfant, mais celles-ci peuvent aussi influencer la stimulation offerte. Ainsi, certains parents d’enfant ayant un trouble du langage offrent moins de stimulation langagière à leur enfant simplement parce que celui-ci se montre moins intéressé à communiquer. Puisque les parents contribuent de diverses façons au développement du langage oral de leur enfant, il semble crucial de trouver une bonne façon de les outiller, en particulier les parents d’enfants présentant un trouble du langage étant donné que ces derniers ont davantage besoin de stimulation.

 

Comment outiller les parents?

Roberts et Kaiser (2011) se sont penchés sur plusieurs études qui avaient en commun d’analyser l’impact de l’intervention des parents ayant reçu une formation portant sur la stimulation langagière. Les études regroupées touchaient les parents d’enfants de 15 mois à 5 ans et 5 mois présentant un trouble du langage s’accompagnant dans certains cas de difficultés plus globales (retard de développement, déficience intellectuelle). Le contenu des formations variait, mais la plus fréquemment étudiée correspondait au programme Hanen. Globalement, les stratégies enseignées étaient souvent de répondre aux initiatives de l’enfant, d’encourager les tours de rôle dans l’échange et de donner le modèle.

Il ressort de l’analyse que les formations données aux parents ont un effet positif sur les habiletés de langage réceptif (compréhension) et expressif de leur enfant, notamment sur les habiletés expressives de morphosyntaxe, au moins à court terme. L’effet sur les habiletés de compréhension orale est moins important, mais les formations offertes mettaient davantage l’accent sur le développement des habiletés expressives. De façon générale, les parents qui ont reçu une formation sont plus réceptifs et donnent plus souvent le modèle.

La méta-analyse ne permet malheureusement pas de statuer sur l’efficacité d’un type de formation par rapport à un autre. En attendant de pouvoir tirer des conclusions plus précises des faits scientifiques, nous savons au moins qu’il est tout à fait légitime de miser sur la formation aux parents d’enfants de 5 ans et moins ayant un trouble du langage. Nous pouvons notamment les encourager à passer du temps en interaction avec leur enfant, à être attentifs à ce que celui-ci communique, à lui parler beaucoup et à utiliser un vocabulaire varié. Enfin, nous pouvons leur expliquer comment reformuler quand l’enfant fait des erreurs et comment répéter ce qu’il dit en ajoutant un élément. Tous s’en sortiront gagnants, à commencer par l’enfant.

Et vous, quelle place faites-vous à la formation des parents dans votre pratique?

[1] Roberts, M. Y. and A. P. Kaiser (2011). «The Effectiveness of Parent-Implemented Language Interventions: A Meta-Analysis», American Journal of Speech-Language Pathology, vol. 20, 180-199.

Crédit photo : Shutterstock

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