Dans son dernier plan stratégique, le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (MELS, 2009) place les parents au cœur de la réussite de leur enfant en leur reconnaissant le rôle de « premiers acteurs » de sa réussite. De nombreuses recherches ont porté sur le rôle de l’engagement des parents dans le suivi scolaire, et les bienfaits de cet engagement pour l’apprentissage et la réussite scolaire ont clairement été démontrés (Pomerantz, Kim, & Cheung, 2012). Or l’engagement parental peut prendre diverses formes, certaines étant plus optimales que d’autres. Voici donc cinq comportements parentaux que les enseignants auraient avantage à encourager chez les parents de leurs élèves.
Il a été établi que les enfants qui réussissent mieux sont ceux dont les parents sont fortement engagés (Pomerantz, Moorman, & Litwack, 2007). Être engagé, c’est montrer à son enfant qu’il est important et le soutenir en mettant à sa disposition les ressources qui lui sont nécessaires. Ces ressources peuvent être matérielles (p. ex., des livres, du matériel scolaire, un pupitre de travail), mais les ressources émotionnelles sont encore plus essentielles. Pour les parents, il s’agit alors de consacrer du temps à leur enfant, de l’encourager, de lui démontrer de l’affection et de l’appréciation, et de manifester de l’intérêt envers son parcours scolaire. Les enseignants devraient donc prendre le temps de souligner aux parents la contribution positive qu’ils peuvent avoir sur la réussite de leur enfant et les inciter à s’engager auprès de leur enfant.
L’enfant a besoin de sentir qu’il agit de façon volontaire, qu’il est à l’origine de ses comportements, et qu’il pose certaines actions parce qu’elles lui sont plaisantes (p. ex., lire pour le plaisir d’apprendre de nouvelles notions) ou parce qu’il leur accorde de l’importance (p. ex., faire ses devoirs car c’est important de réussir à additionner les nombres). Pour soutenir le développement de cette tendance innée de l’enfant, les enseignants gagnent à encourager les parents à adopter des comportements qui soutiennent son autonomie (Ryan & Deci, 2017). Cela inclut de reconnaitre la perspective et les sentiments de son enfant, de fournir des explications signifiantes quant aux exigences que l’on a envers lui, de lui offrir des occasions d’exercer des choix significatifs et d’éviter le contrôle en réduisant l’utilisation de récompenses, de punitions, de menaces, ou d’autres formes de pression (Soenens & Vansteenkiste, 2010).
Ce dernier point est important à souligner auprès des parents. L’utilisation de la coercition par récompenses, punitions ou menaces sont à proscrire, car elles entravent la capacité de l’enfant à intérioriser la valeur de ses actions. Sur une courte période de temps, ces façons de faire peuvent sembler efficaces, mais à moyen et long terme, elles mènent à l’abandon du comportement souhaité.
Les parents peuvent faciliter le développement de la compétence et des capacités d’autorégulation de leur enfant par la structure qu’ils lui offrent. Longtemps considérée à tort comme contrôlante (Pomerantz & Grolnick, 2009), la structure réfère au fait de rendre l’environnement du jeune prévisible afin de lui permettre de réguler ses comportements. Elle implique pour les parents de communiquer clairement leurs règles et leurs attentes ainsi que les conséquences du respect et du non-respect de celles-ci. Offrir une structure signifie aussi d’être constant dans ses règles et ses attentes, de maintenir une supervision et de donner une rétroaction à son enfant à propos de ses efforts et de ses progrès par rapport au respect des règles et à la satisfaction des attentes (Farkas & Grolnick, 2010). Les enseignants gagnent donc à encourager les parents à offrir un cadre de vie stable à leur enfant, tout en leur rappelant de l’introduire de façon positive pour l’enfant, notamment en lui offrant des choix afin de soutenir son autonomie, et non de façon négative, en vue d’imposer un contrôle.
L’enfant interprète les évènements qui surviennent dans sa vie de différentes façons. En ce qui concerne les apprentissages, l’enfant peut attribuer son succès ou son échec aux efforts déployés, aux stratégies utilisées, à la difficulté de la tâche, à ses habiletés et à la chance (voir Weiner, 2000); en d’autres mots, il peut faire différentes attributions. Il est possible de distinguer deux types d’attributions : les mobilisantes et les débilitantes. Les premières consistent par exemple à expliquer une faible performance par le manque d’efforts ou les stratégies utilisées. L’enfant qui fait une attribution mobilisante perçoit qu’il a un contrôle sur le processus et qu’il peut changer les choses pour l’avenir (p. ex., il pourra utiliser de meilleures stratégies d’étude, mettre plus d’efforts). Ce type d’attribution motive l’enfant et l’amène à vouloir s’améliorer la prochaine fois. Les attributions débilitantes, quant à elles, consistent par exemple à expliquer une faible performance par la malchance, son manque d’intelligence ou la difficulté de la tâche. Dans ce cas, l’enfant ne perçoit pas qu’il a le contrôle sur le processus, qu’il peut changer les choses pour l’avenir, et il sera donc peu motivé à essayer de le faire. Ce type d’attribution amène l’enfant à éviter la situation, à abandonner, ou à chercher à dissimuler son inadéquation en ne se mobilisant pas.
La façon dont les parents réagissent par rapport aux évènements scolaires de leur enfant est significative dans le choix des attributions que celui-ci fait. Lorsque les parents expliquent à l’enfant que son résultat aurait été meilleur s’il avait utilisé de meilleures stratégies ou consacré plus d’efforts, ils encouragent des attributions mobilisantes. Il est donc important de sensibiliser les parents à ce type d’attributions lorsqu’ils réagissent aux succès et aux échecs de leur enfant.
Les individus développent des théories implicites relativement à leurs attributs (p. ex., leur intelligence, leur capacité à rédiger un poème, leur habileté à coordonner des mouvements, etc.). La conception que la personne se fait de ses attributs explique les attributions qu’il développe et la mobilisation ou l’absence de mobilisation qui en découle (voir Dweck, 2011). Une théorie implicite est dite fixe quand l’individu croit que ses caractéristiques sont des traits fixes (p. ex., tu es intelligent ou tu ne l’es pas). Dans ce contexte, les évaluations sont perçues comme un «diagnostic» de cette caractéristique. À l’inverse, une théorie est dite malléable lorsque l’individu croit que ses caractéristiques peuvent être développées grâce aux efforts et aux stratégies utilisées. Les évaluations sont alors perçues comme étant informatives. Les parents peuvent amener leur enfant à adopter une théorie malléable, plus garante de sa mobilisation que la théorie fixe, en renforçant l’effort et la qualité des stratégies utilisées lorsque l’enfant vit un succès plutôt qu’en lui parlant de son talent ou de son intelligence. Les enseignants peuvent sensibiliser les parents à cette vision des attributs afin que ceux-ci puissent à leur tour aider leur enfant à adopter une vision malléable de ses caractéristiques et ainsi favoriser sa mobilisation.
Je terminerais en mentionnant que ces pratiques optimales de la part des parents sont également souhaitables de la part des enseignants. Ceux-ci peuvent contribuer à la réussite des élèves en encourageant certains comportements chez les parents, mais aussi en adoptant eux-mêmes ces comportements lors de leurs interactions en classe.
Références
Dweck, C. S. (2012). Self-Theories. Dans P. A. M. Van Lange, A. W. Kruglanski, & E. T. Higgins (Éds), Handbook of theories in social psychology (Vol. 2, pp. 43-62). Thousand Oaks, CA: Sage Publications.
Farkas, M. S., & Grolnick, W. S. (2010). Examining the components and concomitants of parental structure in the academic domain. Motivation and Emotion, 34(3), 266-279. Repéré à : http://selfdeterminationtheory.org/SDT/documents/2010_FarkasGrolnick_ME.pdf
MELS : Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport. (2009). Plan stratégique 2009-2013 du ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport et Plan stratégique 2009-2013 de la Commission consultative de l’enseignement privé. Repéré à http://www.education.gouv.qc.ca/fileadmin/site_web/documents/PSG/politiques_orientations/PlanStrategique2009-2013.pdf
Pomerantz, E. M., & Grolnick, W. S. (2009). Toward a clear and inclusive conceptualization of parental control: Reply to the commentaries. Child Development Perspectives, 3, 176-177. doi: 10.1111/j.1750-8606.2009.00102.x
Pomerantz, E. M., Kim, E. M., & Cheung, C. S. (2012). Parents’ involvement in children’s learning. Dans K.R. Harris, S. Graham, T. Urdan, S. Graham, M. J. Royer, & Z. Moshe (Éds), APA educational psychology handbook, Vol. 2: Individual differences and cultural and contextual factors. APA handbooks in psychology (pp. 417-440). Washington, DC: American Psychological Association.
Pomerantz E. M., Moorman E. A., Litwack S. D. (2007). The how, whom, and why of parents’ involvement in children’s academic lives: More is not always better. Review of Educational Research, 77(3), 373–410. https://doi.org/10.3102/003465430305567
Ryan, R. M. & Deci, E. L., (2017). Self-determination theory: Basic psychological needs in motivation, development, and wellness. New York: Guilford.
Soenens, B., & Vansteenkiste, M. (2010). A theoretical upgrade of the concept of parental psychological control: Proposing new insights on the basis of self-determination theory. Developmental Review, 30, 74-99. Repéré à http://selfdeterminationtheory.org/SDT/documents/2010_SoenensVansteenkiste_DR.pdf
Weiner, B. (2000). Intrapersonal and interpersonal theories of motivation from an attributional perspective. Educational Psychology Review, 12(1), 1-14. https://doi.org/10.1023/A:100901753
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